Une délégation de la section SNETAP-FSU de l’EPL du Mans (72) a rencontré deux députés sarthois de la Majorité présidentielle pour évoquer la situation actuelle de l’enseignement agricole.
Nous avons évoqué principalement deux sujets : la situation des AESH (Accompagnant·e·s des élèves en situation de handicap et le projet de loi « Liberté de choisir son avenir professionnel » et ses conséquences sur l’apprentissage public.
1. – La situation des AESH (Accompagnant·e·s des élèves en situation de handicap) :
Rappel : suite à l’action menée depuis la rentrée (journée du handicap, interventions nationales auprès du ministère et de la DGER, demande de groupes de travail, courriers aux Parlementaires), nous avions rencontré la collaboratrice de Damien Pichereau le 22 mars pour expliquer la différence de traitement de nos collègues AESH en établissements agricoles avec ceux exerçant à l’Éducation nationale. Nous lui avions proposé de venir à Rouillon pour qu’il approfondisse sa connaissance du fonctionnement des EPLEFPA. Sa collaboratrice nous avait précisé qu’elle se rapprocherait de Madame Fontenel-Personne qui est particulièrement sensible à ce sujet et proche de la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées. Ces démarches sont à l’origine de la visite de ce 24 mai à La Germinière. M. Pichereau a déposé une question écrite à l’Assemblée nationale sur la base de nos revendications (à l’instar d’une dizaine de parlementaires sollicité·e·s par le SNETAP-FSU). Ces mobilisations ont conduit le ministre S. Travert à s’engager à faire respecter le décret et à donner la consigne aux DRAAF et par suite aux établissements d’établir les contrats des AESH sur 39 semaines. Or lors d’une CCP régionale saisie par un collègue AESH d’Angers le 18 avril, le DRAAF des Pays de la Loire a indiqué aux représentant·e·s du personnel qu’il n’avait rien reçu de la DGER.
Nous avons donc demandé à M. Pichereau et Mme Fontenel-Personne d’intervenir auprès du Ministre pour qu’il s’assure que la consigne soit effectivement passée aux DRAAF. Par ailleurs, nous leur avons fait part des annonces faites lors du CTEA (Comité technique de l’enseignement agricole) de mercredi 23 mai dans le cadre des discussions budgétaires :
-inscription de 25 ETP pour la prise en charge au niveau national des AESH qui vont passer en CDI l’année prochaine au terme de 6 années de CDD (la gestion passant alors au niveau national) ;
-abondement de la masse budgétaire pour réaliser le passage de 20% des contrats aidés en AESH, conformément à l’engagement ministériel pris ;
-abondement de la masse budgétaire pour anticiper une hausse estimée à environ 10% du nombre de demandes de jeunes en situation de handicap bénéficiant d’un AESH ;
Pour notre établissement, cet abondement est d’autant plus nécessaire que le nombre d’élèves, d’apprentis et même de stagiaires est en constante progression.
-abondement de la masse budgétaire pour anticiper la baisse de 70% à 50% de la subvention du ministère du Travail pour les contrats aidés. Nous leur avons demandé d’intervenir, à l’écrit comme à l’oral dans le débat budgétaire 2019. Ils se sont engagé·e·s à soutenir ces demandes du ministère de l’agriculture lors des débats à l’automne sur le budget et à nous en faire le retour.
2. – Le projet de loi « Liberté de choisir son avenir professionnel » et ses conséquences sur l’apprentissage public.
Nous avons d’abord rappelé que le SNETAP-FSU demandait le retrait de ce projet de loi mais nous adressant à des représentant·e·s de la majorité, nous avons insisté sur la spécificité des CFAA publics qui n’est absolument pas prise en compte dans les textes présentés à ce jour.
Le nombre d’apprenti·e·s dans les CFAA publics représente 75 % de l’effectif total. L’apprentissage dans le secteur agricole représente ainsi, à peu près 10% de l’apprentissage total. Le taux d’insertion professionnelle varie entre 78 et 92% selon les formations. La régulation par les branches prévue dans le projet de loi apparaît inadaptée. En effet, l’emploi en agriculture est fortement territorialisé et dépend des orientations techniques des exploitations agricoles. Une régulation par les branches nous semble illusoire d’autant qu’elles sont peu implantées dans les territoires et diversement structurées selon les domaines couverts (production agricole, transformation alimentaire, aménagement, services en milieu rural). Si toutefois les branches professionnelles géraient les formations par apprentissage, les formations diplômantes (du CAPA au BTSA) dispensées en CFA pourraient progressivement se voir substituer des formations professionnelles de type CQP (Certificat de qualification professionnelle), quid alors des enseignements généraux, et en particulier l’Éducation Socio-culturelle, fondamentaux dans la formation et l’éducation à la citoyenneté ?
La fin de la régulation des régions dans la création des CFA du monde agricole et le financement au contrat vont développer la concurrence entre composantes (public /privé) et au sein des composantes de l’enseignement agricole sur un marché contraint. Les centres, loin de participer à un développement de l’offre, seront condamnés à se partager l’existant. La mise en concurrence des établissements de formation ne créera pas d’emploi par une explosion de l’offre mais accroîtra les difficultés financières des différentes voies de formation de l’enseignement agricole. Cette situation va contribuer à précariser davantage encore l’emploi des centres qui comptent plus de 3 000 personnes dans les établissements publics et dont plus de 50% des personnels sont en contrat à durée déterminée de droit public (pas de prime de fin de contrat, pas de prime de précarité, …..). Sur cet aspect la concurrence risque d’aggraver les conditions de travail déjà dégradées.
Nous n’avons eu aucun engagement à ce stade de la part des député·e·s mais Mme Fontenel-Personne nous a indiqué qu’ils avaient eu deux premières réunions cette semaine à ce sujet et que le ministre était accessible. Elle va donc poser des questions sur la spécificité des CFAA publics car elle n’en a absolument pas entendu parler : ce sujet n’a pas du tout été évoqué mais selon elle ce n’est pas forcément un souci car le principe qui leur a été présenté est le suivant : « ce qui marche, on n’y touche pas » donc c’est peut-être qu’il n’y aura pas de changement pour l’EA. Nous avons exprimé notre scepticisme face à cette remarque car nous avons l’habitude d’être « oublié·e·s » lors des diverses réformes. Et nous avons « retourné » l’argument : si en effet, « on ne touche pas à ce qui marche », l’enseignement public par apprentissage au sein de notre ministère devrait échapper à cette loi…
Elle s’est engagée à nous faire part des réponses qui lui seront apportées. Les député.e.s nous ont vivement conseillé de les solliciter sur toutes les questions que nous nous posons ce que nous ne manquerons pas de faire. Nous avons remis un dossier à la fin de nos échanges comprenant les courriers et analyses du Snetap-FSU sur ces deux sujets ainsi que trois articles du site sur des dossiers que nous n’avons pas eu le temps d’évoquer : le refus de revaloriser la rémunération des ACEN, les conséquences de la réforme du lycée pour le Bac général dans l’enseignement agricole et le BAC STAV (la loi ayant été votée, les parlementaires n’ont plus de marge de manœuvre à ce niveau). Même si l’audience n’a duré que 30 minutes, les échanges se sont déroulés dans un climat constructif et une volonté commune de poursuivre notre relation.
La délégation SNETAP-FSU/CGT-Agri